Le service des études et de la donnée statistique (SDES), avec le concours de l'observatoire national pour la biodiversité (ONB) énonce dans son rapport de 2018 que :
"l'érosion de la biodiversité, que ce soit à l’échelle locale ou mondiale, constitue l’une des principales menaces auxquelles est confrontée l’humanité. Comprendre cet enjeu nécessite de s’intéresser à la fois à la dynamique des écosystèmes, à celle des espèces qu’ils abritent et aux pressions exercées par les activités humaines" (1).
Au cœur de cet enjeu, le rewilding, littéralement "réensauvagement", consiste à réintroduire des espèces à l'état sauvage pour la préservation d'une grande variété d'écosystèmes.
Le terme de rewilding est célèbre depuis les années 1990 grâce à la réintroduction des loups au sein du parc national du Yellowstone aux Etats-Unis. Les canidés ont directement influencé la dynamique du territoire et accéléré la régénérescence de la biodiversité.
En quoi le rewilding est-il novateur ?
Le dessein poursuivi par le rewilding fait l'objet de controverses. Source de conflit européen, il interroge directement notre propre place au sein de la biodiversité. Créateur de lien avec nos origines et avec les animaux, il réinvente notre rapport à l'environnement.
Finalement, qu'est-ce que la nature ? Le rewilding tente d'apporter quelques éléments de réponse à cette question en la positionnant comme la force qui façonne le futur.
Si les spécialistes ont traditionnellement recours au principe de conservation via l'édification d'inventaires des espèces à sauvegarder, le rewilding, quant à lui, est appréhendé au travers du prisme, plus vaste, de la biodiversité.
En effet, la biodiversité peut se définir comme la "diversité des organismes vivants, qui s'apprécie en considérant la diversité des espèces, celle des gènes au sein de chaque espèce, ainsi que l'organisation et la répartition des écosystèmes" (1).
Comment le rewilding constitue t-il un cercle vertueux auto-géré ?
La réintroduction de certains animaux sauvages permet de créer des écosystèmes plus riches, sans intervention humaine.
Les cervidés, stationnant initialement le long des rivières, circulent davantage sur le territoire depuis la réintroduction des loups. Les zones qu'ils rendaient habituellement
vulnérables sont désormais préservées. La végétation croît en bord de rivière, signant par son fait le retour du castor sur les berges. Le castor contribue à la création d'étangs et de
marais, favorables aux poissons, aux oiseaux, aux amphibiens et aux insectes.
Les oies sauvages se nourrissent de roseaux, permettant ainsi de garder des espaces ouverts. Ces oiseaux influencent donc l'évolution du végétal : les forêts ne sont pas fermées, les sols sont hétérogènes
Aux Pays-Bas, le polder d'Oostvaardersplassen abrite des chevaux koniks, d'aurochs de Heck et de cerfs, trois espèces d'herbivores complémentaires qui jouent un rôle non négligeable dans le développement de la faune et de la flore. En effet, leurs choix alimentaires sont hétérogènes, les équidés préférant les herbes courtes, les Heck et de cerfs se rassasiant des herbes laissées par les chevaux, etc.
Aux monts Tarcu, dans les Carpates roumaines, des spécialistes ont observés que la carrure massive des bisons - dont la population est d'environ 5 000 individus en Europe - engendre des trouées et des clairières, apportant ainsi la lumière nécessaire à la croissance d'autres espèces.
Aussi, la population se régule naturellement, en fonction de la quantité de végétaux disponibles et des températures hivernales.
Le rewilding a donc deux finalités. D'une part, il restaure la fonction initiale des animaux qui évoluent en totale autonomie au sein de l'écosystème. D'autre part, il contribue à la protection des espèces menacées, plus particulièrement celles issus de la mégafaune.
Quelles sont les limites et les enjeux du rewilding en Europe ?
En Europe, les infrastructures routières sont denses et l'Homme est présent sur la majorité du territoire. Par conséquent, les territoires consacrés au rewilding sont restreints, bien loin des 900 000 hectares qu'avoisine le parc national du Yellowstone.
Or, à l'instar de l'Homme, les animaux ont naturellement besoin d'espace.
La question est donc de savoir comment restaurer le processus naturel sur ces territoires qui ne sont plus sauvages. L'exode rural apporte un début de réponse à cette éminente question. Le rewilding peut constituer une nouvelle forme de ressource économique au bénéfice des populations rurales, à condition que ces espaces soient réellement partagés.
En France, la présence du loup fait notamment débat (3). Les spécialistes constatent que la la cohabitation génère des conflits entre l'Homme et l'animal en fonction de l'ancienneté de cette cohabitation. La gestion locale n'est alors pas la même.
BIBLIOGRAPHIE
- (1) SDES, "Biodiversité - Les chiffres clés", Édition 2018
- GIEC, https://www.ipcc.ch/
- https://biodiversity.europa.eu/
- ONB, http://indicateurs-biodiversite.naturefrance.fr
- (2) Arte, "L'europe à la reconquête de la biodiversité", www.arte.tv, disponible en replay du 04/05/2019 au 11/06/2019
- (3) CAPLoup, "Loup, pour en finir avec les contre-vérité sur le pastoralisme et sur la chasse, http://www.cap-loup.fr/wp-content/uploads/CAPLoup_livret_Contreverites_web.pdf
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